Se différencier ou disparaître

Secteur suisse de la construction

Secteur suisse de la construction
  • Octobre 29, 2020

Procéder au changement, adopter ce qui a fait ses preuves

Logement, mobilité, commerce, production industrielle, tourisme, sécurité, santé – dans ces domaines et dans de nombreux autres, le secteur suisse de la construction influence notre vie au quotidien. Il se concentre presque exclusivement sur notre pays. Il contribue à environ 15 % du produit intérieur brut. Le bâtiment et le génie civil représentent quelque 330 000 emplois à temps plein. Cela correspond à un tiers de l’ensemble des salariés du secteur industriel.

Cette publication montre très clairement que seuls ceux qui se différencient sortiront vainqueurs. La créativité et l’esprit novateur sont requis. Le secteur de la construction est confronté à un changement de paradigme et s’oriente vers une plus grande différenciation grâce à une coopération en réseau. La digitalisation, plus particulièrement, offre d’intéressantes possibilités à cet égard.

Elle réduit les interfaces, augmente la qualité des processus de planification et de gestion et contribue à réduire les coûts des non-conformités et les temps d’inactivité sur le chantier. La Covid-19 pourrait entraîner la destruction des structures en silos dans le secteur de la construction et la transformation rapide des schémas de pensée rigides.

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Aperçu et perspectives : Ce que nous retenons de l'étude

Près de 90 % des participants à l’étude considèrent que l’absence de différenciation représente l’un des principaux défis. Les conséquences sont une guerre des prix permanente et des marges réduites. En d’autres termes : une grande partie du secteur est soumise à une concurrence féroce. Les faillites régulières montrent que la survie des entreprises est en jeu.

Se différencier, c’est se positionner clairement sur le marché. Cela implique qu’une entreprise doit tracer sa voie,  faire des choix stratégiques et les suivre de manière cohérente. Pour cela, il faut avoir le courage de faire les choses différemment de ses concurrents. Pour cela, il faut être capable de se focaliser sur une activité. Mais il faut également être capable de renoncer. Cela ne peut se faire qu’avec une créativité de tous les instants, une direction ferme et une bonne dose de persévérance. Celui qui donne un positionnement clair à son modèle d’entreprise peut s’établir durablement et améliorer ses marges.

Quiconque souhaite profiter des opportunités qu’offre le marché doit offrir des prix compétitifs. Cela ne veut pas dire qu’il faut « acheter » les commandes en proposant le prix le plus bas, mais qu’il faut savoir quel niveau de prix est acceptable et où sont ses propres limites. Une différenciation et un positionnement clairs offrent une plus grande marge de manœuvre dans les discussions tarifaires et les processus d’appels d’offres, ce qui peut être décisif pour maintenir une marge solide.

Nous sommes curieux de voir comment la digitalisation va influer sur le triptyque « coûts - efficacité – différenciation » dans le secteur de la construction. Les enjeux sont divers : Comment les acteurs exploitent-ils ce potentiel ? Peuvent-ils transformer les nouvelles technologies et ressources numériques en modèles d’affaires innovants et différenciateurs ? Ou les utilisent-ils pour accroître l’efficacité et optimiser les processus et structures de coûts ?

Les technologies et outils numériques sont utilisés depuis des années, que ce soit pour la communication, les soumissions ou le dessin des plans. Mais en numérisant un mauvais processus, il ne s’améliore pas nécessairement. Un point intéressant : notre étude montre qu’à ce jour, ce sont principalement les processus support tels que l’administration et le marketing qui ont été numérisés. La planification intégrée vient en troisième position. Les processus métiers, tels que la mise en œuvre ou l’exploitation, ne viennent qu’ensuite.

Les solutions numériques permettent d’impliquer très tôt tous les acteurs participant à la construction et de procéder à des ajustements dès la phase de réalisation. De cette manière, de nouveaux modèles de coopération intégrée peuvent être créés tout au long de la chaîne de valeur. L’important savoir-faire technique des différentes spécialités de la construction se regroupe. Les ouvrages et leur exploitation ultérieure ne sont plus la somme de prestations individuelles, mais représentent un système complet. Et cela rend possible de nouveaux modèles d’affaires intéressants.

Nouvelles technologies, modèles numériques, matériaux innovants : aucun de ces facteurs n’offre à lui seul une valeur ajoutée. Le facteur décisif est leur utilisation et leur association dans une solution combinée. C’est là que les hommes et leur corps de métier entrent en jeu. Car seuls ceux qui savent orchestrer les instruments peuvent être meilleurs que la concurrence – et donner le ton.

Si une entreprise mobilise tout son potentiel, de l’apprenti et de l’ouvrier au chef de chantier et à la direction, en passant par l’ouvrier spécialisé et le contremaître, pour atteindre un objectif commun, elle réalise des performances élevées, que ce soit en termes d’efficacité, de coûts des non-conformités ou d’innovations. Des modèles de gestion fédéralistes basés sur le respect et la valorisation sont nécessaires. Les nouvelles solutions numériques aident à penser et à agir tout au long de la chaîne de valeur.

Il existe également des approches innovantes dans le domaine des matériaux et des procédés. Celles-ci ont le potentiel de révolutionner le secteur de la construction car elles offrent des réponses aux grandes tendances mondiales (« Megatrends ») telles que le développement durable, l’automatisation ou la numérisation. Peu d’offres sont à ce jour adaptées au grand public, mais les acteurs innovants du marché adoptent une approche audacieuse et cherchent de nouvelles voies pour le futur secteur de la construction.

Du côté de la demande, l’évolution de la mobilité constitue le défi principal qu’il faudra relever demain : les véhicules autonomes seront bientôt une réalité. La conduite autonome modifiera considérablement l’infrastructure routière. Elle diminue l’incertitude que représente le facteur humain et accroît la capacité tout en réduisant le besoin en itinéraires. Par ailleurs, le trafic non motorisé dans les zones urbaines va continuer de s’accroître, notamment en raison de l’augmentation de l’alimentation électrique et des besoins modestes en espace. Des extensions et adaptations de l’infrastructure seront nécessaires tant pour la conduite autonome que pour le trafic non motorisé, ce qui sera particulièrement impactant pour le génie civil.

De la zone de confort à la zone de crise

Un virus propage de l’incertitude : Le secteur suisse de la construction est passé en quelques semaines d’une situation confortable avec des carnets de commandes pleins vers une situation de crise marquée par de grandes incertitudes. Cela se reflète dans l’évaluation des perspectives d’avenir avant et avec la Covid-19. L’optimisme qui a précédé l’épidémie de Covid-19 s’explique par le fait que les chantiers de construction en Suisse étaient nombreux et que le secteur tournait à plein régime jusqu’au printemps 2020. Par conséquent, les attentes en matière de chiffre d’affaires et d’EBIT étaient élevées et les espoirs dans la digitalisation, la durabilité ou la résolution de problèmes systémiques étaient grands.

Les volumes oui, les marges oui et non

La Covid-19 a fait place à la désillusion : Une comparaison des évaluations avant et depuis la Covid-19 révèle une nette inquiétude. Cela est particulièrement vrai dans le domaine du génie civil, qui, selon les estimations, a connu la plus forte progression du chiffre d’affaires avant la Covid-19. Les prévisions de croissance ont été ramenées de 15 % à 9,5 %, soit environ un tiers. Cette évaluation est probablement due à la retenue attendue et à la tendance du secteur public à reporter les projets. Toutefois, le génie civil devrait encore se développer en raison du cycle de vie des infrastructures (p. ex. constructions de remplacement.

Aussi inerte que le béton

Nouvelles technologies, vieux problèmes : Outre la gestion habile de la Covid-19, les entreprises participant à l’étude considèrent que la résolution holistique des problèmes, le développement durable, la digitalisation et les innovations technologiques telles que les nouveaux matériaux, les nouveaux procédés ou la robotique sont les principaux moteurs de l’avenir. D’autre part, ils considèrent que la guerre des prix, l’absence de différenciation et une éventuelle inversion des taux d’intérêt sont des risques majeurs. Ils voient également des défis importants dans le recrutement de personnel qualifié. Les exigences légales et les normes de construction rigides sont également considérées comme un danger.

Cher client !

Les appréciations des participants à l’étude peuvent être évaluées en fonction des domaines d’activité et de la taille des entreprises. Cette analyse montre une nette focalisation sur la dimension client. Les différentes priorités dans le domaine de la prestation de services sont intéressantes. Les acteurs de la conception de projets veulent y travailler beaucoup plus que dans les autres parties de la chaîne de valeur. Dans l’ensemble, ce sont précisément les grandes entreprises qui concentrent leur attention sur la prestation de services. Elles s’attendent à profiter de l’élan bénéfique de la digitalisation et de l’utilisation de nouvelles technologies ou de nouveaux processus.

La virtualité devient réalité

Opportunité avérée : Avant la Covid-19, près de neuf participants à l’étude sur dix voyaient la digitalisation comme une opportunité. Toutefois, seuls 60 % environ des interrogés estiment que son importance actuelle dans leur entreprise est élevée ou très élevée. Cela soulève la question de savoir si et pourquoi 40% d’entre eux passent à côté de cette opportunité. Un examen plus approfondi révèle que l’écart entre l’opportunité et la valeur accordée est particulièrement important pour les petites entreprises : aujourd’hui, seulement 50% des petites entreprises attachent une grande ou très grande importance à la digitalisation. Les moyennes et grandes entreprises semblent vouloir – ou pouvoir – saisir cette opportunité.

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Directeur de la Société Suisse des Entrepreneurs (SSE)

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Directrice de Holzbau Suisse

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Copropriétaire et représentant de la quatrième génération du groupe Frutiger

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Directeur général de Kaufmann Oberholzer AG

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Professeur d'architecture et de fabrication numérique à l'ETH Zurich

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Président du conseil d’administration de STUTZ AG

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